Congrès de l’Association des archivistes du Québec à Québec
Je suis heureux de participer au 45ième congrès de l’Association des archivistes du Québec (AAQ) qui se déroule du 13 au 15 juin 2016 au Centre des congrès de Québec sous le thème « Consommer l’information : De la gestion à la médiation documentaire ». J’y ferai une présentation sur les enjeux liés à création à partir d’archives et parlerai de mon travail en lien avec le Portail international archivistique francophone (PIAF).
Mardi le 14 juin à 14h :
ENJEUX D’ACCÈS ET DE DIFFUSION EN ARCHIVISTIQUE : POINTS DE VUE D’UN CHERCHEUR-CRÉATEUR
Le numérique améliore l’accès et la diffusion des archives rendant plus facile la réutilisation des archives à des fins artistiques. Conçu dans l’esprit d’en expérimenter la dynamique, le projet de recherche et création Archivoscope se veut un dialogue entre l’archiviste et le créateur, une exploration en images et en sons des possibilités que nous offrent les documents d’archives.
À travers cette expérience seront abordés des enjeux en lien avec l’accès et la diffusion des archives tels que la dynamique de collaboration entre archiviste et créateur, les droits d’utilisation et les plateformes de diffusion et d’accès. Des idées pour faciliter la collaboration entre archivistes, chercheurs, artistes et institutions seront présentées.
La communication fera aussi état de la recherche sur la diffusion réalisée sous l’égide d’Yvon Lemay dans le cadre du projet Archives et création : nouvelles perspectives sur l’archivistique financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH).
Mercredi le 15 juin à 10h45 :
REFONTE DU PORTAIL INTERNATIONAL ARCHIVISTIQUE FRANCOPHONE (PIAF) : DE NOUVEAUX OUTILS POUR UNE COMMUNAUTÉ APPRENANTE EN ARCHIVISTIQUE SUR LE WEB
Placé sous l’égide de l’Association internationale des archives francophones (AIAF) et sous la responsabilité d’un comité de pilotage composé d’une quinzaine de professionnels, d’enseignants universitaires et de spécialistes des technologies de cinq pays francophones, le Portail International Archivistique Francophone (PIAF) vise à donner accès gratuitement à des ressources en archivistique (modules de formation en ligne, références bibliographiques, espace professionnel d’échange) pour toute la francophonie. En 2014, 150 000 personnes ont utilisé cet outil web unique.
Le PIAF a subi entre 2014 et 2016 une profonde refonte par rapport à la précédente version de 2009. La communication a donc pour objectif de présenter le nouveau portail et de souligner l’apport québécois au projet.
Seront traités les nouveaux outils pour accompagner la mutation des métiers et faire émerger une communauté d’apprentissage et un espace de collaboration entre pair ; la refonte du module de gestion bibliographique (le développement d’une classification internationale, la mise à jour des termes archivistiques pour l’indexation et l’implantation de Wikindx, logiciel axé sur le travail collaboratif) ; le bulletin de veille en archivistique pour la Francophonie ; et les modules de formation en ligne.
Le projet Archivoscope, archives et création émane d’une démarche exploratoire combinant différentes techniques de manipulation d’images et de sons provenant d’archives d’institutions québécoises. Les huit vidéos qui composent l’œuvre résultent d’autant d’approches différentes.
Note : Les textes présentés ici sont des extraits de l’article « Créer à partir d’archives : bilan, démarches et techniques d’un projet exploratoire », réalisé sous la direction d’Yvon Lemay et d’Anne Klein et paru en 2015 dans le cahier de recherche « Archives et création : nouvelles perspectives sur l’archivistique. Cahier 2 ». Montréal, Université de Montréal, École de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI). Disponible à http://hdl.handle.net/1866/12267
L’ensemble des documents relatifs au projet sont disponibles en téléchargement sur Internet Archive à l’adresse suivante : https://archive.org/details/Archivoscope
Démarche
En 2013, pour faire suite à la rédaction d’un article sur les archives sonores et la création, j’ai eu le désir d’élaborer un projet artistique qui placerait les archives au cœur du processus créatif. À travers une démarche créatrice expérimentale et exploratoire, j’y voyais l’opportunité de développer de nouvelles avenues de recherche entre création et archives.
En parallèle, ce nouveau projet continuerait à développer les techniques de manipulation du son et de l’image explorées dans le film La Divine Comédie, non pas dans une optique narrative, mais plutôt dans une forme qui s’approche de la vidéomusique. En devenant le matériau et le sujet, les documents d’archives prendraient une place centrale dans la création. Ils ne seraient pas en périphérie du propos, mais constitueraient le point de départ d’où s’engendrerait le reste de l’œuvre.
L’objectif fut fixé de réaliser huit courts métrages de cinq minutes créés à partir d’archives. Le projet pourrait ainsi être appréhendé et présenté tantôt comme des courts métrages distincts, tantôt comme un tout plus grand que la somme de ses parties. L’idée initiale étant que l’œuvre serait autant de tableaux abordant des techniques différentes de réutilisation des archives, chaque court métrage représentant un thème ou une ambiance soulignée par une esthétique unique. Archivoscope a été rendu possible grâce à une bourse du Conseil des arts et des lettres du Québec.
Tableau 1 – Regroupement, provenance, types et quantité de documents
Regroupement des documents et Titres des vidéos
Provenance des documents (institutions)
Types et quantité de documents
VIDÉO 1.Montréal et la Grande Guerre
Musée McCord
35 images fixes (documents textuels et cartes postales)
Archives de la Ville de Montréal
84 images fixes (photos en noir et blanc, affiches couleur et documents textuels)
VIDÉO 2.36 variations sur autant d’images
Division de la gestion de documents et des archives de l’Université de Montréal
66 images fixes (photos en noir et blanc)
VIDÉO 3.Mémoires asynchrones
Archives de la Ville de Montréal
1 document d’images en mouvement (16 mm, couleur, durée : 18m30s)
VIDÉO 4.Couper haut
Cinémathèque de plans d’archives de l’Office national du film du Canada
2 documents d’images en mouvement (35 mm, noir et blanc, durée : 2m30s)
VIDÉO 5.Cyberprimitivisme
Cinémathèque de plans d’archives de l’Office national du film du Canada
2 documents d’images en mouvement (35 mm, noir et blanc, durée : 6m30s)
VIDÉO 6.Les tombeaux du temps
Cinémathèque de plans d’archives de l’Office national du film du Canada
3 documents d’images en mouvement (35 mm, noir et blanc, durée : 9m30s)
VIDÉO 7.Cris et murmures ou La glossolalie du trompe-l’œil
Service de gestion des documents et des archives de l’Université Concordia
11 images fixes (photos en noir et blanc et couleur)3 documents d’images en mouvement (noir et blanc et couleur, durée : 4m00s)3 documents sonores (discours, 34m30s)
VIDÉO 8.Incantations pour la fin du Temps
Pointe-à-Callière, cité d’archéologie et d’histoire de Montréal
71 images fixes (photos en noir et blanc, gravures en couleur)
Autre
Phonothèque québécoise
61 enregistrements sonores
Types de modifications
La modification du matériau visuel ou sonore constitue l’essence du travail de création à partir d’archives. Chaque technique est en soit une contrainte et détermine un cadre esthétique au rendu final. Dans cette section seront présentées les principales techniques de modification des archives explorées au cours du projet. Ces techniques découlent des caractéristiques inhérentes à la nature de chaque catégorie de documents. Par extension, je définis trois catégories principales de documents : les documents sonores, les images en mouvement et les images fixes.
Documents sonores
Issues de la tradition électroacoustique (aussi appelée acousmatique), les techniques de base de modifications d’enregistrements sonores peuvent se diviser en cinq classes : modifications de durée, de timbre, de hauteur, de dynamique et d’espace. Le Tableau 2 donne un tour d’horizon des techniques de modification offertes par le numérique applicables à un segment (ou document ou échantillon) sonore.
Tableau 2 – Documents sonores : principales modifications possibles
Modifications de durée
Modifications de timbre
Modifications de hauteur
Modifications de dynamique
Modifications d’espace
Accélérer et ralentir / contraction et étirement temporelsRépéter / boucleDécouper / montage
Filtrer / modification du spectre sonoreInverser / inversion du signal sonore
Augmenter et diminuer / transposition du son
Augmenter et diminuer / modification du volume sonore
Spatialisation sonore
Toutes ces techniques peuvent être combinées par des manipulations successives selon différents ordres, de manière linéaire ou non. Elles sont rendues possibles grâce à des logiciels de montage sonore, des séquenceurs musicaux, des modules de granulation sonore et des processeurs d’effets.
Images fixes et en mouvement
Les images en mouvement (films ou vidéos) partagent sensiblement les mêmes caractéristiques que les documents sonores. Le Tableau 3 s’applique à l’aspect visuel seulement, l’aspect sonore ayant été traité plus haut. Quant aux images fixes, les mêmes modifications sont applicables sauf celles de durée. Encore ici, les techniques peuvent être combinées de différentes manières et selon une infinité de variantes.
Tableau 3 – Images en mouvement : principales modifications possibles
Modifications de durée
Modifications spectrales
Modifications de forme
Modifications d’espace
Accélérer et ralentir / contraction et étirement temporelsRépéter / boucleDécouper / montage
Filtrer / modification des couleurs et de la luminositéEnlever une couleur / Incrustation
Déformer et effacer / rétrécissement, allongement, flou, masque, etc.
Spatialisation dans un espace 3d
1. Montréal et la Grande Guerre
Première vidéo réalisée, j’avais pour Montréal et la Grande Guerre un corpus de plus d’une centaine d’images fixes – photos en noir et blanc, documents textuels, cartes postales et affiches couleur – de l’époque de la Première Guerre mondiale à Montréal. Les contraintes principales étaient de respecter le thème et de rendre les images fixes dynamiques. L’intention globale était ici de susciter l’émotion en immergeant le spectateur dans une ambiance créée par la mise en scène dynamique et la mise en valeur des qualités esthétiques des documents évocateurs de cette époque.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Animation 2d
Technique utilisée tout au long de cette vidéo, la technique d’animation 2d permet d’animer des images fixes telles que des photos, affiches ou encore des documents textuels. Il est possible d’animer un élément isolé – préalablement découpé dans le logiciel Photoshop ou en incrustation (voir la description plus bas) – dans un espace bidimensionnel ou tridimensionnel, mais aussi d’animer une image en y définissant des points de déformation (Figure 1).
Figure 1 – Points de déformation pour animer une image dans le logiciel After Effect
Environnement 2.5d
Un décor virtuel a été construit dans un environnement 2.5d à partir de photographies de la Commission des services électriques tirées des fonds et collections des Archives de la ville de Montréal [1]. L’expression 2.5d exprime l’idée d’images 2d disposées dans un environnement 3d. Il s’agit donc de découper des segments de photos et de les disposer dans un environnement virtuel 3d (Figure 2) dans lequel une caméra tout aussi virtuelle peut être animée. La caméra se « promène » dans le décor ce qui confère le mouvement. Une version surréelle du Montréal de cette époque est ainsi recréée.
Figure 2 – Décor 2.5d construit avec le logiciel After Effect
Morphing
Une autre des techniques spécifiques utilisées dans ce vidéo est la morphose (ou morphage) – plus communément appelée morphing – qui « […] consiste à fabriquer une animation qui transforme de la façon la plus naturelle et la plus fluide possible un dessin initial en un dessin final. » (Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Morphing) La métamorphose continue, rendue grâce à un effet de fondu enchaîné entre les photographies de visages de soldats, donne un effet d’animation flottant et fantomatique. La Figure 3 présente une capture d’écran de cette section qui inclut aussi des surimpositions d’autres éléments visuels textuels et photographiques.
Figure 3 – Morphing de visages de soldats
Synthèse vocale
Autre technique expérimentée qui se classerait dans la catégorie des utilisations indirectes, la transformation de documents textuels en sons. Il s’agit de convertir le fichier texte en sons grâce à un logiciel de synthèse vocale, sorte de robot pouvant lire un texte donné. Dans la vidéo, j’ai retranscrit en format numérique des textes de cartes postales d’époque (Figure 4) et d’un manuel de traduction destiné aux soldats. Il en résulte une voix robotique et monocorde rendant une distance émotive face aux mots.
Figure 4 – Carte postale du Musée McCord ayant servi à la synthèse vocale
Incrustation
La vidéo met aussi en valeur des éléments typologiques, calligraphiques et iconographiques superposés ou surimposés grâce à la technique d’incrustation (appelée chroma key ou green screen en anglais), technique qui consiste à enlever une couleur en la rendant transparente pour permettre la surimposition d’images différentes (voir Figure 3). Cette technique relativement courante dans toute production cinématographique a été fréquemment utilisée tout au long du projet.
→ Réalisation
Pour Montréal et la Grande Guerre, le son et la musique ont d’abord été créés. Parallèlement à cela a été découpée et isolée une quantité d’images en vue d’être animée. Les sections de la morphose et du décor 2.5d ont été ensuite créées séparément. Ensuite les différentes sections et animations furent combinées et travaillées sur la musique à l’intérieur d’une structure en trois parties thématiques : 1) introduction / la conscription, 2) développement / la guerre et 3) conclusion / l’armistice. Enfin, une partition de clarinette basse a été composée et enregistrée sur la trame sonore et des bruitages ont été ajoutés pour compléter l’ambiance globale.
Cette vidéo fut réalisée à partir de photos provenant de la Division de la gestion de documents et des archives de l’Université de Montréal. La contrainte créative principale était de créer une vidéo de cinq minutes à partir de photos en noir et blanc – dont une série de photos toutes semblables de la construction du pont de Québec [2] – d’un intérêt visuel quelconque. Je me suis donc fixé comme objectif et règle de réaliser de courtes animations de 6 à 10 secondes qui exploreraient différentes esthétiques et, à l’instar de la vidéo précédente, différentes techniques d’animation 2d et 2.5d.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Coloration
À la différence de la vidéo sur la Première Guerre, je voulais transformer les couleurs originales des photos. La technique utilisée tout au long de la vidéo consiste à assigner de nouvelles couleurs d’après la luminosité. Par exemple, tout ce qui est blanc devient rouge et tout ce qui est noir devient bleu (Figure 5).
Figure 5 – Exemple de coloration à partir d’une photo noir et blanc
Animation par le son
Autre technique explorée, l’animation de certains éléments visuels était déclenchée par des ondes sonores. N’importe quel paramètre visuel peut théoriquement être assigné à réagir à l’impulsion (ou dynamique) sonore d’un fichier son donné. Chaque segment visuel a donc été assigné à un segment sonore pour générer l’interaction entre sons et images.
Synthèse granulaire
Des segments d’extraits audio de la Phonothèque québécoise ont été triturés à l’aide du logiciel libre de granulation sonore Soundgrain d’Olivier Bélanger qui permet de modifier en temps réel plusieurs paramètres (hauteur, durée, répétition, etc.) d’un fichier son choisi. Les résultats de ces expérimentations ont servi de base à la composition de la musique. Le même logiciel a aussi servi à la création des musiques pour les vidéos Les tombeaux du temps et Cyberprimitivisme.
→ Réalisation
La composition musicale a précédé l’animation. Chaque segment d’animation a d’abord été conçu un par un comme autant de courts métrages. Ils ont ensuite été montés sur la musique. Au final, la vidéo se veut une exploration ludique, surréaliste et éclectique des possibilités offertes par l’animation de photos d’archives.
Toutes les images utilisées pour cette vidéomusique sont tirées d’un court métrage promotionnel de 20 minutes de 1957 intitulé Montréal conservé par les Archives de la Ville de Montréal [3] et qui a été numérisé expressément pour le projet. De même, la trame sonore a été composée à partir d’extraits sonores de ce même film.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Réduction du bruit
Un des défis que posait ce projet particulier était d’améliorer la qualité des images. En effet, la qualité du film était médiocre du fait du support original 16 mm (peu de définition d’image et détérioration due au temps) et au transfert numérique (pixellisation de l’image lors du transfert) : l’application d’un effet vidéo de réduction du bruit s’avérait une solution pour parer au problème. Des effets vidéo (flou bilatéral, coloration et contraste) ont été ensuite appliqués pour donner une texture plus patinée aux images. On peut voir plus bas une image avant et après le traitement (Figures 6 et 7).
Figure 6 – Image originale non traitée
Figure 7 – Image traitée avec un réducteur de bruit et des effets
Mashup audio
Toute la trame sonore a été composée à partir d’extraits de la musique du film original. À la manière des disc-jockeys (ou platinistes), j’ai échantillonné, répété en boucles et superposé certains extraits musicaux – sans toutefois en altérer la nature – pour recomposer totalement ce qui est devenu la nouvelle trame sonore. Encore ici, l’utilisation d’un filtre réducteur de bruit fut nécessaire pour améliorer la qualité de l’enregistrement sonore.
→ Réalisation
À partir du mashup créé, des instruments virtuels ont été ajoutés pour composer la trame musicale, puis les images ont été montées sur la musique, un peu comme un clip vidéo – plusieurs effets d’accélération, de répétition, de ralentissement et d’inversion ont été appliqués aux images. Le montage a ensuite été raffiné, puis des parties pour saxophone alto et trompette ont été composées et enregistrées (Figure 8). Comme le suggère le titre, le résultat final donne une impression de dystopie surannée et ludique mélangée à la nostalgie de la mémoire d’une époque révolue, celle-ci étant opposée à un traitement, de par le montage, résolument asynchrone et moderne.
Quatrième vidéo réalisée, Couper haut se veut une expérimentation de l’aléatoire comme générateur de la structure d’une œuvre. La technique employée est inspirée du cut-up inventé par Brion Gysin en 1959 (UBUWEB Papers, http://www.ubu.com/papers/burroughs_gysin.html) ainsi que des expériences de composition aléatoire de John Cage. La contrainte, dans ce cas-ci librement imposée, consistait donc à créer à partir d’éléments combinés aléatoirement.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Générateur de nombres aléatoires
Deux films de l’Office national du film constituent le matériau de base : ils sont découpés en 282 segments égaux correspondant à 71 mesures de 4/4 à 120 battements par minutes, soit 2 images par secondes pendant plus de 2min 20 secondes. Un générateur de nombres aléatoires (Random.org, http://www.random.org/sequences/?mode=advanced) a permis d’obtenir une liste de chiffres (Figure 9) qui a ensuite servi à placer les segments en désordre pour constituer, avec le logiciel Vegas Pro, la base du montage (Figure 10).
Figure 9 – Liste de chiffres générés aléatoirement
Figure 10 – Montage de base constitué des segments aléatoires dans le logiciel Vegas Pro
Animation typographique
Une autre idée était d’exploiter les notices de description de documents d’archives comme matériau générateur de l’œuvre. J’ai donc repris les textes de description de plans provenant de l’ONF et décrivant les deux vidéos – Battle for Oil et Canadian News – pour réaliser des animations textuelles qui viennent ponctuer en surimpression le montage des images (Figure 11).
Figure 11 – Animation textuelle en surimpression
→ Réalisation
Des boucles de segments répétés ont été faites d’après la séquence aléatoire initiale. La musique a été ensuite repiquée et composée d’après la trame sonore originale : des instruments virtuels et du bruitage ont été ajoutés. Enfin, les textes animés furent insérés. Le résultat final est une vidéo plutôt déroutante d’où émane l’aliénation des images rendues absurdes par la répétition et la linéarité, devenant par extension une critique de tout le mécanisme de la guerre.
5. Cyberprimitivisme
Probablement la plus éclatée, cette vidéomusique basée sur trois films de l’ONF explore des effets visuels similaires au mashup et à la coloration ci-haut mentionnés, mais appliqués au vidéo et jouant avec le contraste noir et blanc / couleur. Le défi était une fois de plus de rendre intéressantes et dynamiques des images qui de prime abord ne sont pas d’un intérêt particulier.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Montage rythmique, repiquage MIDI et partitions
Au niveau sonore, des extraits d’émissions de radio des années 1940 et 1950 provenant de la phonothèque découpés en microsegments et remixés sur une échelle temporelle métronomique fixe ont généré les sections de l’œuvre. À partir de la piste audio ainsi remixée, une boîte à rythmes a été calquée à l’aide d’une programmation MIDI [4] (Figure 12). Prenant la piste MIDI comme base, des parties pour trompette et clarinette basse ont ensuite été composées.
Figure 12 – Boîte à rythmes calquée en MIDI sur l’audio dans le logiciel Cubase
→ Réalisation
Peut-être la plus anarchique dans sa conception, Cyberprimitivisme a été conçue itérativement à travers plusieurs expérimentations de manipulation de sons et d’images. La musique a été composée en premier, puis le montage des images s’est effectué sur la musique et fut suivi d’une phase d’expérimentation de traitement de l’image, de techniques et d’effets visuels. En résulte une vidéomusique qui joue sur les contrastes entre couleurs et noir et blanc, linéarité et répétition, tension et détente. Le titre est un clin d’œil au néologisme « cyberprimitif » ainsi qu’au courant de peinture primitiviste. Enfin, le film suggère une critique de la technologie à travers une certaine aliénation des images.
Réalisée avec des images de trois courts métrages de l’ONF, la vidéomusique Les tombeaux du temps est construite essentiellement sur le principe de l’étirement temporel. Elle se veut une réflexion sur les images et les sons rendus « éternels » et atemporels par l’enregistrement sur un support.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Étirement temporel
Je fais ici une différence entre la notion de ralenti et d’étirement temporel, le ralenti étant l’effet obtenu en faisant la lecture d’un document vidéo ou audio plus lentement (par exemple à 8 images/secondes au lieu de 24 images/secondes), alors que l’étirement temporel consiste à ralentir et remplir, par un procédé de calcul informatique, les interstices entre les images filmées ou les échantillons musicaux. Il y a donc, dans le cas de l’étirement temporel et à l’opposé du simple ralenti, une modification de l’intégrité du document. Dans ce cas-ci, j’ai donc utilisé l’étirement temporel tant pour l’audio que pour la vidéo. Pour l’audio, le logiciel libre Paul’s Extreme Sound Stretch a été utilisé, alors qu’Avid Media Composer a servi à étirer la vidéo jusqu’à 2% de la vitesse originale.
→ Réalisation
La musique fut composée en premier à partir des trames sonores étirées des trois films originaux de l’ONF. Des images sélectionnées des trois films ont été ensuite étirées puis montées sur la musique. Il en résulte une œuvre lente et flottante comme une transe, aux images suspendues dans le temps qui rendent parfois toute la puissance d’évocation dramatique de certains plans d’archives.
7. Cris et murmures ou La glossolalie du trompe-l’œil
Exploration des textures qu’offrent les différents matériaux, cette vidéo créée à partir des documents d’archives obtenus de Service de gestion des documents et des archives de l’Université Concordia met en valeur plusieurs types de documents : film, photos et enregistrements sonores.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Glitch art
L’intention de départ avec Cris et murmures était d’exploiter les possibilités offertes par les différentes techniques de glitch art. Le principe du glitch art est de modifier, de corrompre un fichier numérique par des moyens détournés :
« On savait déjà que les ratés du numérique pouvaient donner naissance aux expérimentations musicales les plus intéressantes. Aujourd’hui, les partisans du glitch art transforment les bogues en images fascinantes. » (Arte, Glitch http://www.arte.tv/fr/glitch/7524184,CmC=7503936.html)
Le glitch peut s’appliquer tant aux documents visuels que sonores. Les documents originaux présentaient déjà plusieurs glitchs – pixellisation des images, distorsions numériques sonores, etc. – dus au transfert de support. Il ne me restait qu’à exploiter cette manne. Plusieurs techniques ont été expérimentées, mais peu sont applicables dans l’environnement Windows. En effet, à la différence de Mac, Windows permet peu ou pas la lecture de fichiers « corrompus » ou dont le codage a été modifié de manière non conventionnelle. Cependant plusieurs logiciels et ressources en ligne dédiés au glitch ont été testés, mentionnons au passage Corrupt.Video, Pixel-Drifter, Satromizer, GlitchPatternGenerator_5, Unsigned mirror et img glitcher.
Scan glitch
La principale technique retenue pour la vidéo, le scan glitch, consiste à déplacer un document lors de la numérisation à l’aide d’un numériseur pour créer des déformations (Figure 13). Étant donné que les documents reçus étaient en format papier, cette technique s’avérait particulièrement adaptée aux circonstances. C’est donc dire qu’il s’agit d’un triple transfert : le document ayant été une première fois numérisé puis imprimé par le service d’archives pour être par après numérisé de nouveau.
Figure 13 – Exemple de scan glitch tiré de Cris et murmures
Photos filmées
Prenant partie des photos qui m’avaient été transmises sur support papier, il apparaissait intéressant comme technique de filmer ces dernières pour leur donner du mouvement. Encore ici, il s’agit d’un triple transfert numérique-analogue-numérique qui est évocateur en soi du processus archivistique de conservation des documents.
Sons inversés
Des archives orales – des discours de René Lévesque et de Sir George Williams et des extraits sonores des vidéos Computer Riot et Henry Hall-interview, le plus souvent joués à l’envers –, ont servi de base à la création de la trame sonore.
→ Réalisation
Une banque d’images fixes a résulté de la première étape de scan glitch des photos. Parallèlement, la musique a été composée à partir des extraits modifiés d’archives orales. À l’étape du montage, la division de l’écran en triptyque a permis de combiner les différents médias. Des instruments virtuels et de la trompette ont étoffé la trame sonore. L’aboutissant se présente comme un amalgame pluridimensionnel de diverses textures sonores et visuelles qui met en relief la trace du passage du temps sur les documents archivés et les effets des transferts de support sur ceux-ci.
Dernier opus, cette vidéomusique met en valeur les documents d’archives de Pointe-à-Callière, cité d’archéologie et d’histoire de Montréal. Principalement composé de photos et de gravures, le corpus d’environ soixante-dix documents se prêtait bien à l’animation 2d, alibi pour expérimenter une fois de plus de nouvelles techniques.
→ Visionner la vidéo
→ Techniques utilisées
Animation vectorielle
L’image vectorielle se définit comme
[…] une image numérique composée d’objets géométriques individuels, des primitives géométriques […] auxquels on peut appliquer différentes transformations (homothéties, rotations, écrasement, mise à l’échelle, extrusion, inclinaison, effet miroir, dégradé de formes, morphage, etc.). Elle se différencie en cela des images matricielles […], qui elles sont constituées de pixels. (Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Image_vectorielle)
Dans cette vidéo, j’ai converti des images matricielles en format vectoriel en utilisant le logiciel Illustrator pour ensuite pouvoir les animer dans After Effect (Figure 14). Le vectoriel a l’avantage de ne pas subir de perte de qualité lors des modifications effectuées, ce qui m’a permis d’explorer plusieurs techniques (morphage, surimposition et masquage).
Figure 14 – Image vectorielle d’un bateau et masquage
→ Réalisation
L’œuvre est conçue comme plusieurs segments s’emboitant les uns dans les autres. Chaque segment visuel a été d’abord travaillé un à la suite de l’autre puis des bruitages ont été ajoutés en direct sur l’image. Pour finir, des instruments (kora, piano à pouce, guitare et flûte) ont été inclus. L’ensemble hétéroclite, qui mélange gravures et photos avec plusieurs techniques d’animation, donne une impression surréaliste et hors du temps.
Retour sur les techniques
On voit que les possibilités de réutilisation des documents d’archives sont presque illimitées. En tant que créateur, les contraintes artistiques inhérentes à l’utilisation d’archives comme matériau premier combinées aux techniques actuellement permises par la technologie sont devenues pour moi le moteur de découvertes esthétiques nouvelles. De plus, les ambiances et les émotions qu’évoquent les documents d’archives, où toutes les traces du processus archivistique antérieur ajoutent à l’effet, participent d’eux-mêmes à l’enrichissement des œuvres créées.
Le Tableau 3 résume les principales techniques utilisées tout au long du projet :
Tableau 3 – Principales techniques par vidéo
Vidéo
Principales techniques
1. Montréal et la Grande Guerre
· Animation 2d· Environnement en 2.5d· Morphing
· Synthèse vocale
· Incrustation
2. 36 variations sur autant d’images
· Coloration· Animation par le son· Synthèse granulaire
3. Mémoires asynchrones
· Réduction du bruit· Mashup audio
4. Couper haut
· Générateur de nombres aléatoires· Animation typographique
5. Cyberprimitivisme
· Montage rythmique, repiquage MIDI et partitions
6. Les tombeaux du temps
· Étirement temporel
7. Cris et murmures ou La glossolalie du trompe-l’œil
[4] « Le Musical Instrument Digital Interface ou MIDI est un protocole de communication et de commande permettant l’échange de données entre instruments de musique électronique […] » (Wikipédia, https://fr.wikipedia.org/wiki/Musical_Instrument_Digital_Interface). Il est possible d’assigner n’importe quel son à une piste programmée en MIDI.
Section (encore en développement) qui regroupe en vrac enregistrements et partitions de plusieurs compositions instrumentales pour diverses formations.
Vagues (2002)
Pièce pour saxophone alto solo composée pour et interprétée par Sylvain Houle.
Sont listées ici les principales collaborations en tant que compositeur, arrangeur ou instrumentiste avec des projets, groupes et musiciens de tous azimuts .
Taxon Lazare
[Depuis 2019] Groupe de type organ trio hard bop formé de Michaël Cotnoir (guitare), Simon Côté-Lapointe (clavier) et Jonathan Gagné (batterie).
Un taxon Lazare est un taxon existant que l’on a cru éteint, ou un taxon qui n’est pas retrouvé dans le registre fossile pendant une période significative de l’histoire de la Terre, et qui semble « réapparaître » à un moment donné. Wikipédia
[2018-2020] Horizons est un duo composé du saxophoniste Erik Hove et du pianiste Simon Côté-Lapointe. Ces deux improvisateurs chevronnés réinterprètent à leur façon les compositions de Sun Ra, pianiste/compositeur/chef d’orchestre américain.
La genèse du projet remonte à 2018 alors que Simon tombe sur les archives manuscrites des compositions de Sun Ra dans les tréfonds du web. Le duo joue à cette époque dans un restaurant et c’est lors d’un spectacle que l’idée de reprendre ces compositions fabuleuses émerge. Forts de plus de 20 ans chacun d’expérience chacun, tant en jazz qu’en musique actuelle, les deux interprètes/improvisateurs/compositeurs se mettent à la tâche de déchiffrer et défricher ce riche répertoire qui frappe par son originalité et son style résolument avant-gardistes.
Se voulant les continuateurs de l’œuvre, Hove et Côté-Lapointe mettent en avant-plan avec la formule sax/piano – en contraste avec l’interprétation habituelle des compositions de Sun Ra par de gros orchestres – la virtuosité et l’interaction des musiciens mais aussi la beauté singulière des mélodies.
Quelques unes des pièces les plus marquantes de Sun Ra ont été retenues pour l’album, produit par Hecto et enregistré devant public au Café Résonance en décembre 2019, que nous sommes heureux de vous partager ici.
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Horizons - Interplanetary Music : The Satellites Are Spinning
[2019-2022] Le Trio Lapointe-Hébert-Gagné combine des influences jazz, classique et actuelle qui résulte en une musique rafraîchissante alliant le groove à l’intellect.
Simon Côté-Lapointe : piano
Olivier Hébert : contrebasse
Jonathan Gagné : batterie
Ces musiciens actifs sur la scène du jazz montréalais depuis une vingtaine d’années proposent un répertoire moderne et original allant des standards de jazz à la musique classique en passant par des compositions inédites.
[2017-2019] Composé de Simon Côté-Lapointe au piano et de Jean-François Ouellet au saxophone, le duo [kote:welɛt] s’illustre sur la scène jazz montréalaise depuis 2016. Ces deux improvisateurs, arrangeurs et compositeurs de haut calibre se réapproprient les standards de jazz à travers une démarche moderne et originale.
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[kote:welɛt]
Inchworm
You and the Night and the Music
Giant Steps
Inchworm - Live à la Casa Obscura 2017
You and the Night and the Music - Live à la Casa Obscura 2017
[2016-2020] Claviériste pour le guitariste Joy Anandasivam avec le batteurs Magella Cormier. Musique classique carnatique de l’Inde du sud servie à la sauce jazz.
Carnatic Jazz Fusion Live (2019)
Joy Anandasivam : composition/arrangements, guitare électrique/electric guitar
[2015-2021] Pianiste et claviériste pour le guitariste Michel Morisette. Spectacles avec Al McLean, sax; Norman Lachapelle, basse ou Frédéric Alarie, basse; Magella Cormier, batterie à Toronto et Sainte-Thérèse.
Session studio (2017)
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Michel Morissette - New Bop Studio Version (27 mars 2017)
Michel Morissette - Over The Edge Studio Version (27 mars 2017)
Michel Morissette - Red Ketchup avec Magella Cormier et Simon Coté Lapointe Studio (27 mars 2017)
Michel Morissette: Blues For My Baby - Magella Cormier et Simon Coté Lapointe September 12 2015
Michel Morissette - Sainte-Thérèse - Septembre 2015
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Fred Vézina
[2012-2014] Claviériste et réalisateur pour l’album des compositions de Fred Vézina.
After Party Acid People
[2011-2014] Compositeur et claviériste pour le groupe rock After Party Acid People. Nombreux spectacles à Montréal et participation à des festivals tels que Pouzzafest, Buckfest,Festival Anachronik, Festival d’expression de la rue. Album réalisé par Navet Confit (à paraître).
Spread (2013)
Vidéo clip réalisé et musique composée par Simon Côté-Lapointe. Paroles par Myles Morin.
Clément Larose
[2008-2015] Claviériste pour les spectacles Impromptu et Code Rouge du guitariste Clément Larose. Prestations au Petit Campus et au O Patro Vys.
FSM
[2008-2010] Membre du Trio FSM avec Magella Cormier (batterie) et Frédéric Vézina (guitare électrique).
Madcaps
[2007-2009] Compositeur, claviériste et arrangeur pour l’album Juice du groupe Madcaps. Quatre tournées canadiennes et une en France avec Fred Pellerin, guitare et voix; Réné De Montigny, sax; Marie-Anne Arsenault, basse, Jonathan Gagné, batterie.
Namori
[2006-2009] Claviériste pour le chanteur/batteur Namori Cissé. Spectacles aux Maisons de la culture Frontenac et Pointe-aux-Trembles ainsi qu’à Québec, Gatineau, Calgary et en Ontario. Album Point d’interrogation sorti en 2010.
Hiatus
[2006-2008] Compositeur et claviériste. Groupe de musique actuelle avec Pierre-Luc Brillant, guitare électrique; David Paquin, guitare électrique; Jeffrey Kühn, basse; Francis Rossignol, batterie. Spectacles au Off festival de jazz de Montréal avec le duo Soletti/Besnard et à la Casa del popolo avec Martin Tétreault comme invité spécial.
Malarafe
[2001-2004] Pianiste et compositeur dans le groupe de jazz actuel Malarafe avec Alexandre Fecteau, saxophones; Jean-Félix Mailloux, contrebasse; Jonathan Racine, batterie. Plus de 150 spectacles à Montréal. Concerts avec invités : Jean Derome (sax, flûte), Tom Walsh (trombone), André Leroux (sax).
Mouvement de Musique Présente (MMP)
[1998-2003] Co-initiateur/concepteur/compositeur. Groupe de musiciens à géométrie variable. Événements : Big bandMMP à la Casa obscura (juin 2003), Spécial expéri-mental 3 présenté à l’UdM à la salle Claude-Champagne (hiver 2002), MMP live au studio Victor (2001) et Spécial expéri-mental 2 au Lion d’or (1999).
Rouge Ciel
[1997-2010] Compositeur et claviériste. Quatuor de musique actuelle avec Antonin Provost, guitares; Guido Del Fabbro, violon; Némo Venba, batterie et trompette. Trois albums parus. Prestations notables : Festival des musiques progressives de Montréal (2009), Guelf Jazz Festival (2008), Festival international de jazz de Montréal au Musée d’art contemporain dans la série jazz actuel (2004), OFF festival de jazz de Montréal (2002), Festival des Musiques de Créations du Saguenay/Lac-Saint-Jean (2002), participation aux films La moitié gauche du frigo (2000) de Philippe Falardeau et La beauté de Pandore de Charles Binamé(2000).